Géomorphologie 3

1.  Le relief
2.  L'érosion
a)  L'érosion sur les interfluves, ou érosion aréolaire
1°.  La désagrégation thermique
2°.  La désagrégation mécanique
3°.  L'oxydation
4°.  L'hydratation
5°.  La dissolution
6°.  L'hydrolyse
7°.  Le rôle des organismes vivants
b)  Les mouvements des débris
1°.  Sur les versants rocheux
2°.  Sur les versants non rocheux
c)  L'érosion par les eaux courantes, ou érosion linéaire
1°.  Les torrents
2°.  Les autres cours d'eau
d)  L'érosion par les eaux souterraines
3.  Roches et modelé
a)  Les roches sédimentaires
1°.  Les roches sédimentaires meubles
2°.  Les roches sédimentaires cohérentes
b) Les roches éruptives
c) Les roches métamorphiques
1°.  Les dômes
2°.  Les filons
3°.  Le granité
4°.  Les diorites
5°.  Les micaschistes
6°.  Les gneiss
7°.  Les leptynites
4.  Roches et relief volcaniques
a)  Introduction
b) Les boucliers et plateaux de laves
c) Les trapps
d) Les volcans stromboliens
e) Les volcans d'explosion
1°.  Le type vulcanien
2°.  Le type ignimbritique
f) Les formes volcaniques particulières
5.  Relief et structure
a) Les structures tabulaires
b) Le relief de cuesta
c) Les structures plissées
d) Les structures faillées
e) Les contacts
1°.  Les contacts sans faille
2°.  Les contacts avec faille
6.  L'évolution du relief
a) La théorie du cycle d'érosion de Davis
b) La succession des cycles d'érosion
c) Critique de la théorie davisienne. Nouvelles théories de remplacement. Introduction à la géomorphologie climatique
7.  Les paysages glaciaires
a) Introduction
b) Les divers types de glaciers
c) Le travail de la glace
d) Les formes glaciaires
8.  Les paysages périglaciaires
a) Caractères et domaines du gel
1°.  Intensité et durée
2°.  Régions affectées
3°.  Processus d'action du gel
4°.  Formes de ségrégation de la glace
5°.  Le rôle du gel
6°.  Les processus du dégel et de la fonte des neiges
7°.  Rôles du ruissellement et du vent
8°.  Les formes dues aux processus périglaciaires
9°.  Le réseau hydrographique
9.  les paysages arides
a) L'action érosive du vent
b) La désagrégation mécanique
c) Le paysage désertique
10. Les paysages tropicaux humides
a) Le modelé de la forêt dense
b) Le modelé des savanes
c) Formes d'aplanissement
11. Les paysages littoraux
a) Processus subaériens
b) La plage
12.  Les applications de la géomorphologie
 

Le propre de la géomorphologie est d'observer, de décrire et d'expliquer les différentes formes du relief, qu'il est possible de définir comme l'ensemble des saillies de l'écorce terrestre. Les forces constructrices, dites forces tectoniques, et les éruptions volcaniques édifient le relief, sur lequel s'exerce l'érosion ; celle-ci se traduit par l'enlèvement et l'accumulation de matériaux et agit en fonction de la nature des roches (facteurs lithologiques), de l'agencement des terrains (facteurs structuraux) et de l'aire d'action (facteurs climatiques).

3.  Roches et modelé

L'érosion, qu'elle entraine un modelé de dissection ou un modelé d'aplanissement, s'exerce sur des roches d'origine, de nature et de propriétés différentes. Leur origine permet de les classer en plusieurs catégories : les roches endogènes, comptant les roches plutoniques consolidées en profondeur et les roches volcaniques solidifiées en surface ; les roches exogènes, ou roches sédimen-taires, résultant de l'érosion des roches préexistantes, de l'activité d'êtres vivants ou de phénomènes physiques et chimiques externes; les roches métamorphiques, issues de la transformation des roches endogènes et exogènes. Au sein de chaque groupe, leurs propriétés permettent de les classer en roches plus ou moins résistantes à l'érosion, en fonction principalement de leur cohérence.

a)  Les roches sédimentaires (première approche... seront étudiées complètement dans un chapitre leur étant réservé)

1°.  Les roches sédimentaires meubles

Les roches sédimentaires à grains non liés par un ciment concernent, notamment, les sables et les argiles.

  • Les sables

— Les sables sont constitués de grains de quartz résistants. L'érosion, qui n'a aucun effet sur chaque grain, s'exprime par l'entraînement des grains les uns par rapport aux autres et dépend par conséquent du caractère plus ou moins meuble de la formation. Dans le cas d'un sable cohérent (sable humide ou sable à composition hétérogène), le déplacement s'effectue par masses de grains; les agents d'érosion étant la solifluxion et le ruissellement. Dans le cas d'un sable plus meuble (sable sec, sable à composition homogène, uniquement quartzeux), il s'effectue par grains indépendants et le creeping remplace alors la solifluxion et le ruissellement.

  • Les argiles

— Les argiles, résultant d'une altération, ont le pouvoir de s'hydrater. Elles sont imbibées profondément d'eau (quand elles se dessèchent, elles présentent des craquelures) et solifluent. La pénétration de l'eau est ordinairement très lente, si bien que l'argile est pratiquement imperméable en l'absence de fentes de dessiccation. L'eau ruisselle alors, entraînant la formation des ravins les plus nets quand les pluies sont violentes et rares (reliefs de bad-land).

2°.  Les roches sédimentaires cohérentes

Les roches sédimentaires à grains cimentés sont principalement les conglomérats et les grès.

  • Les conglomérats

— Les conglomérats sont des ensembles cimentés de grains de tailles diverses, de cailloux, de galets et de blocs. Ils sont cohérents et donnent en général des abrupts verticaux. Quand la pente est forte, l'érosion linéaire est à l'origine d'un relief en bad-land si le conglomérat est argileux, avec apparition de cheminées de fées là où les blocs protègent du ruissellement.

  • Les grès

— Les grès sont formés de grains de sable, de composition homogène (par conséquent, de perméabilité moyenne) et assez résistants. Les plus résistants, les quartz/tes, grès à ciment siliceux, donnent souvent des crêtes aiguës.

  • Les schistes

— On donne le nom de schistes (du grec skistos = coupé, fendu) à une importante classe de roches argileuses possédant la structure dite schisteuse et dont le type est l'ardoise. On peut diviser ces roches en feuillets plus ou moins minces, et cette fissilité conserve généralement une direction constante sur de grandes étendues. On admet depuis les expériences de Sharpe et de Tyndall que les schistes ont été formés par compression, suivant un plan parallèle à leur plan de clivage.

  • Les calcaires

Les calcaires, roches essentiellement formées de carbonate de calcium, sont sujets à la dissolution. Celle-ci est d'autant plus élevée que l'eau est chargée de gaz carbonique. Le bicarbonate de calcium, terme des réactions chimiques, est instable et soluble dans l'eau. L'érosion par dissolution entraîne un type de relief particulier, le relief karstique, qui s'observe dans des calcaires résistants mais permettant la pénétration de l'eau par de larges fissures.

Les formes superficielles les plus simples de la topographie karstique concernent les lapiez, formes très diverses, en creux, ayant l'aspect de sillons, de cannelures, de tranchées, et dont la profondeur varie de quelques centimètres à une dizaine de mètres. Disposés soit parallèlement dans le sens de la pente, soit irrégulièrement avec des ramifications, les lapiez résultent de l'action dissolvante des eaux atmosphériques qui attaquent les parois des fissures. Les lapiez, nus, couverts ou perforants, se présentent le plus souvent en groupements denses : les champs de lapiez.

Lapiaz des Chauvins

C'est à partir des fissures élargies par dissolution et par éboulement que se forment les avens, qui présentent la forme d'entonnoirs. L'aven conduit généralement à une grotte au plafond de laquelle les eaux infiltrées déposent par les fissures la calcite, carbonate pur de calcium cristallisé, sous la forme de stalactites, tandis qu'au fond de la grotte les stalagmites prennent naissance par le même processus.

Les dolines sont des dépressions fermées, de forme circulaire, qui présentent souvent un profil en baquet; leur bord est généralement abrupt et leur fond remblayé de terre. Leur diamètre varie de quelques dizaines de mètres à quelques hectomètres, tandis que leur profondeur peut aller jusqu'à 200 m. Les dolines, comme les lapiez, se groupent soit en champs, soit par coalescence en ouvalas, dont l'origine est encore confuse.

Quelques dolines

Les formes les plus vastes du relief karstique sont les poljés, qui sont des dépressions fermées où s'organise un écoulement. Larges de quelques centaines de mètres à quelques kilomètres et longs de quelques kilomètres à quelques dizaines de kilomètres, les poljés présentent généralement des bords en pente assez forte et un fond plat tapissé de terre et accidenté de buttes rocheuses, les hums. Les poljés sont souvent parcourus par une rivière qui se perd dans un gouffre, le ponor, et occupés par des lacs ou marais quand la nappe phréatique remonte en surface. La réalisation d'un poljé résulte de la coalescence d'ouvalas dont les bords recoupés deviennent les hums.

Les formes précédentes sont le produit de l'érosion par dissolution. Cependant, il existe une forme fréquente due à l'écoulement en surface : le canyon, vallée encaissée à versants raides parcourue par un cours d'eau allogène (dont la source est extérieure au karst). L'essentiel de l'érosion se produit au fond du lit car les versants montrant, selon l'alternance des bancs calcaires, une succession d'abrupts, de surplombs et de talus plus ou moins raides, sont durs et perméables. Le canyon présente son aspect caractéristique dans des bancs de calcaires épais. Si le cours d'eau atteint une roche imperméable, la vallée s'élargit par le fond et présente alors un profil en U montrant un fond évasé et des versants verticaux qui reculent parallèlement à eux-mêmes. En amont, la vallée peut aboutir à une source vauclusienne, au contact de la couche imperméable et des calcaires sus-jacents et au-dessus de laquelle la vallée se termine par un abrupt : c'est une vallée en cul-de-sac, appelée une reculée. Le recul de la tête de vallée est très actif. Outre les formes superficielles, le karst présente un grand nombre de cavités aux formes les plus diverses, associant des conduits tubulaires ou coudés ainsi que des galeries ou des cavernes horizontales.

Les canyon et les formes surprenantes que l'on peut y trouver

Les cavernes qui apparaissent généralement au niveau des nappes karstiques montrent un réseau de galeries présentant soit des ramifications irrégulières réunies par des passages étroits, soit des élargissements brusques débouchant dans des grottes, soit encore des rétrécissements aboutissant à des boyaux étranglés. La caverne la plus développée est la caverne du Mammouth située sur le plateau du Kentucky (États-Unis), dont le réseau ininterrompu de galeries s'étend sur plus de ' 50 km, tandis que le plateau est accidenté de quelque 60000 entonnoirs karstiques. Le fond des cavernes karstiques comporte ordinairement des cours d'eau ou de petits lacs.

Le niveau de ces eaux karstiques est en liaison avec ie niveau du cours d'eau allochtone qui traverse le karst. L'émergence est le phénomène selon lequel les eaux karstiques apparaissent sur un versant ou au fond d'une vallée. L'émergence ou exsurgence peut prendre la forme soit d'un suintement, soit d'une source isolée ou d'une ligne de sources, soit d'une fontaine à débit continu ou intermittent (fontaines vauclusiennes). Le cours d'eau allochtone peut disparaître par infiltration et absorption au sein du karst : la résurgence concerne la réapparition de ses eaux à la surface. Ainsi, près d'Immendingen (Allemagne), les eaux du cours supérieur du Danube s'engouffrent dans des ponors, coulent sous terre sur plus de 12 km en suivant des chenaux karstiques et réapparaissent à la surface par une grosse exsurgence qui donne naissance au fleuve.

Deux représentations du relief karstique souterrain

b) les roches éruptives

Les roches éruptives de massif, ou roches platoniques, sont des roches cristallines d'origine endogène consolidées à une certaine profondeur. Selon les minéraux qui les composent, elles sont caractérisées par leur acidité (granité) ou leur alcalinité (gabbro). Leurs textures sont variables : de petits grains définissent des roches aplitiques, des grains moyens et égaux des roches grenues, des cristaux de grande taille des roches porphyroïdes, et des cristaux géants des roches pegmatitiques. Il existe divers modes de gisement.

c) Les roches métamorphiques (première approche... seront étudiées complètement dans un chapitre leur étant réservé)

Les roches métamorphiques sont celles qui ont subi une transformation, qui résulte de la chaleur et de la pression, et qui consiste en une cristallisation selon un plan tel que les cristaux des roches métamorphiques sont orientés. Il existe trois types de métamorphisme : le métamorphisme de contact, ou local, qui engendre des roches dites cornéennes, le métamorphisme lié à la présence de failles, qui donne naissance à des mylonites, et le métamorphisme général, qui s'effectue en profondeur, intéressant de vastes surfaces, et entraînant la formation notamment des schistes, des micaschistes et des gneiss.

Les roches cristallines, qu'elles soient plutoniques ou métamorphiques, présentent un trait général caractéristique : elles sont assez imperméables alors que les sols qui en découlent sont perméables. Par conséquent, les sources sont nombreuses et les vallées rapprochées. Les interfluves se réduisent en croupes ou échines généralement convexes en relation avec le creeping, prépondérant sur les versants. Ceux-ci présentent des formes variées : ils peuvent être peu accusés et à l'origine d'un paysage de collines, rectilignes, à boules, en zigzag ou à crêtes.

1°.  Les dômes

Les formes les plus typiques sont les dômes (pains de sucre), en pente forte, dissymétriques, hauts de 100 à 200 m, qui sont formés le plus souvent d'une roche plus résistante que la roche environnante. Les régions cristallines sont caractérisées également par des fractures se traduisant dans la topographie par des escarpements (versants rocheux à très forte pente, supérieure à 45°) et, si les cours d'eau s'installent à l'endroit d'une fracture, par des vallées de ligne de fracture.

2°.  Les filons

Les filons, formés de roches différentes de celles qu'ils traversent, très minces mais parfois d'une longueur considérable, constituent d'autres accidents typiques des régions cristallines. Ils correspondent le plus souvent à une ligne de résistance plus grande que la roche encaissante et se traduisent dans le paysage par un alignement de hauteurs ou un rétrécissement des vallées. Les roches cristallines diffèrent cependant par leur résistance à l'érosion aréolaire, que celle-ci s'exprime par gélivation ou par altération chimique.

3°.  Le granité

Le granité est ainsi tantôt une roche dure tantôt une roche tendre. Il est d'autant plus résistant que sa texture est fine, sa porosité faible, que les diaclases sont rares, que le quartz est en forte proportion et que les feldspaths calco-sodiques ainsi que le mica noir sont peu abondants. Il donne des formes typiques en boules et en blocs. Les formes en creux sont les taffoni, cavités hémisphériques dues à la dissolution chimique et à l'altération liées à la différence d'humidité à l'ombre et au soleil. La désagrégation totale du granité donne naissance à l'arène granitique. La granulite, granité à deux micas, est généralement plus résistante que le granité en raison de la présence du mica blanc peu altérable.

4°.  Les diorites

Les diorites, plus basiques que le granité, contiennent un minéral noir, l'amphibole, inaltérable en l'absence d'eau et particulièrement hydrolysable en sa présence. Aussi, quand la pente est forte, les diorites sont-elles peu attaquées car l'eau ruisselle. Au contraire, quand la pente est faible, l'eau séjourne et l'hydrolyse se produit. Ainsi, les diorites donnent soit des reliefs, soit des formes en creux.

Les formes liées aux roches métamorphiques sont très variables en fonction du degré de résistance d'une part, et de la plus ou moins grande netteté de la schistosité d'autre part.

5°.  Les micaschistes

Les micaschistes présentent une nette schistosité, qui est à l'origine de crêtes, de versants heurtés; leur résistance varie avec leur teneur en quartz, les concentrations en quartz pur correspondant aux secteurs les plus résistants.

6°.  Les gneiss

Les gneiss montrent des plans de schistosité beaucoup moins nets que les micaschistes. Leur relief est semblable à celui des granités malgré l'absence de boules.

7°.  Les leptynites

Les leptynites sont très résistantes, caractère qui est lié à l'abondance de quartz et de feldspaths non calciques et à la rareté des minéraux noirs ainsi que du mica noir. Les versants montrent des pentes de l'ordre de 45°.

Les roches formées de nombreux minéraux noirs, comme les amphibolites, qui rappellent les diorites, entraînent des reliefs saillants quand la pente est forte et que l'eau ne peut stagner. En effet, l'amphibole est attaquée quand l'eau ne ruisselle plus. C'est pourquoi le relief engendré par les amphibolites est contrasté et présente des reliefs isolés et de larges vallées.


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Luc Van Bellingen

 

 

 

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